Netlabis fostering its commitment to becoming a digitalpure player in Mauritius, viaa “data as a service” approach, among other tools.

His trade is on the go in a world where data is as precious as gold… or water. His firm grip of data science has every ingredient to make us want to go back to school.

molakaz.mu, launched in December 2019, is now online and ready to enhance the real estate industry with an array of comprehensive tools. Philippe Jaunet says it all.

Philippe Jaunet est cofondateur et CEO de NetLab, qui gère les sites C2C weshare.mu et molakaz.mu. Le premier compte plus de 800 000 visiteurs uniques par an et plus de 300 000 membres sur Facebook tandis que le deuxième vient d’être lancé et se spécialise dans les transactions immobilières. À ce jour, Netlab a investi plus de 500 000 euros à Maurice et emploie 15 salariés. L’objectif de ces sites Internet ciblant les transactions de « particulier à particulier » vise à permettre à tous les Mauriciens « de gagner en pouvoir d’achat », explique Philippe Jaunet. Cet ingénieur de formation, diplômé de l’École centrale Paris, avec spécialisation en intelligence artificielle et recherche cognitive, possède également un doctorat en informatique quantique.

Vous venez de lancer une plateforme C2C spécialisée dans les biens immobiliers. Ce n’est pas la première plateforme de ce type. Pourquoi vous lancez-vous dans ce projet ?
Molakaz.mu n’est certes pas la première plateforme, mais elle diffère des autres de par son modèle. Nous proposons en effet des biens immobiliers à petits budgets, accessibles à tous, jusqu’aux biens immobiliers de prestige. Nous mettons ainsi à disposition des Mauriciens l’ensemble des annonces immobilières du pays, sans frais d’agence – car nous n’en sommes pas une – ni commissions. Nous accentuons particulièrement nos efforts sur le service et la qualité. C’est la raison pour laquelle les annonces déposées sur molakaz.mu ont une durée de vie de 60 jours si elles ne sont pas renouvelées par les propriétaires, et sont toutes modérées et traduites par nos équipes Qualité. Nous n’acceptons aucune annonce sans prix ni photo, mais nous disposons d’un « User Service » joignable tous les jours de 8h à 22h afin d’accompagner notre communauté d’utilisateurs. Il est important de noter que le dépôt d’annonces ainsi que les services associés sont et resteront toujours gratuits pour les particuliers.
Molakaz.mu s’inscrit dans une vision plus globale, celle qui consiste à permettre à tous les Mauriciens de gagner en pouvoir d’achat et d’améliorer leur qualité de vie au sein du projet NetLab. Notre projet va plus loin que la mise à disposition de ces plateformes, il contribue aujourd’hui à l’émergence d’un nouvel écosystème à Maurice, celui de l’économie circulaire.
Enfin, pour finir de répondre à votre question, nous lançons cette plateforme de location/achat/vente axée sur l’immobilier car les études et les données recueillies par tous les organismes ainsi que par notre département Data tendent à démontrer qu’il existe un réel besoin d’optimiser l’expérience de recherche immobilière pour les Mauriciens. Facebook et les sites regroupant essentiellement des annonces de programmes résidentiels neufs ou destinées à des budgets élevés ne suffisent pas à répondre correctement et concrètement à la demande.

Quel est le bilan de weshare.mu à ce jour ?
Weshare.mu est une véritable réussite. Ce site a été lancé en septembre 2016, après plus d’une année d’études et de développement. Nous sommes partis, mon associé Ludovic Balloux et moi, d’une page blanche afin de pouvoir contrôler l’ensemble de nos flux. Nos « data scientists » s’attachent à s’enrichir quotidiennement de l’expérience utilisateur pour proposer les offres les mieux adaptées aux besoins de chacun. L’intelligence artificielle fait partie intégrante de nos développements et la donnée fait notre force.
Weshare.mu est aujourd’hui le No 1 de la vente de produits de seconde main entre individuels, avec plus de 800 000 visiteurs uniques par an. Il est par ailleurs le site Internet sur lequel les Mauriciens passent le plus de temps. Il était très important pour nous de réveiller les consciences en encourageant une consommation nouvelle et plus responsable.
Au travers de nos plateformes, nous contribuons à la création d’un écosystème dont le rôle social et sociétal est majeur. Associée à la notion évidente de développement durable, notre offre prend tout son sens. Nous n’avons pas encore atteint le seuil de rentabilité mais, en tant que start-up, nous devons accepter de ne pas être soumis à cet impératif.

Comment se fait le paiement sur weshare.mu et quel contrôle avez-vous sur les transactions ?
Nous proposons un service de mise en relation, nous n’intervenons en aucun cas dans la transaction. Via notre site, les utilisateurs peuvent communiquer entre eux par téléphone, mail ou sms. Notre rôle est d’agir en tant que facilitateur entre particuliers ; l’échange de biens et le paiement se déroulent entre nos utilisateurs. Nous verrons par la suite, en fonction des tendances et comportements, les fonctionnalités prioritaires à déployer.
Nous assurons d’ores et déjà une expérience de recherche optimale pour tous, la meilleure du marché. Nous avons une équipe formidable qui travaille en « back-end » pour s’assurer que les informations importantes sur le produit sont communiquées en toute transparence, pour un achat avisé. Nous proposons un site Web gratuit, performant et efficace qui permet de chercher, trier et comparer des milliers de produits. Les internautes passent en moyenne 12 minutes par visite sur le site et plus de 350 nouveaux produits sont postés chaque jour.

Vous dites que NetLab a pour mission d’améliorer le pouvoir d’achat et la qualité de vie des Mauriciens. Le gouvernement a déjà beaucoup fait en ce sens avec l’introduction du salaire minimum, de l’impôt négatif et de la hausse de la pension. N’est-ce pas dangereux pour l’économie de mettre autant d’argent dans la main du consommateur dans un délai si court ?
Les décisions gouvernementales en faveur du pouvoir d’achat et de l’amélioration de la qualité de vie des Mauriciens ne peuvent être que louables. Je pense que la question n’est pas de mesurer la quantité d’argent mise entre les mains des Mauriciens mais davantage la façon dont cet argent est employé. Et c’est là que NetLab devient utile, voire nécessaire, à tous les Mauriciens. Cet argent peut être dépensé judicieusement tout en permettant de remettre en circulation des objets de seconde main. C’est un cercle vertueux qui n’est plus à prouver. Nous permettons aux Mauriciens de dépenser mieux.

Certainement, mais une consommation à outrance avec une base industrielle qui s’effrite depuis ces dernières années, couplée à une faible productivité, est-ce vraiment ce dont le pays a besoin ?
Il est extrêmement rare qu’un pays soit autosuffisant, Maurice ne l’est pas non plus. Les produits manufacturés viennent pour la plupart de fournisseurs étrangers, dont l’outil industriel est loin de s’éroder. Nous sommes aujourd’hui devant un fait accompli. Le panier moyen du Mauricien augmente, il est le reflet de son pouvoir d’achat. La consommation est donc sujette à une croissance organique inexorable.
En revanche, la surconsommation est un réel problème ; le Black Friday a récemment engendré une importante levée de boucliers. Elle est un problème car elle s’accompagne très souvent de surendettement et parce qu’elle est en totale opposition avec toute idée que l’on puisse se faire du développement durable. Le bilan carbone est indécent et le gâchis terrifiant.
Les achats impulsifs, les promotions perpétuelles, les stratégies particulières permettant d’encourager les consommateurs à acheter à crédit sont autant d’éléments à ne pas négliger. Nous sommes dans un système libéral où la règlementation des prix est extrêmement complexe, d’une part à mettre en œuvre, d’autre part à contrôler. La vocation de NetLab est en parfaite cohérence avec mon propos. Nous mettons à disposition des plateformes permettant de réinjecter dans l’économie des objets de seconde main. Notre modèle permet à ceux qui le souhaitent de vendre ces objets pour en acquérir d’autres, ou non. Il permet enfin d’être un vecteur d’équilibre et une source de régulation à une surconsommation excessive.

Comptez-vous investir dans d’autres projets à Maurice ?
Nous avons une équipe de « Data Intelligence », dirigée par Ludovic Balloux, cofondateur et COO de NetLab. Nous arrivons aujourd’hui à analyser et à interpréter les besoins des Mauriciens, et prévoyons effectivement de lancer de nouveaux projets cette année dans le but de répondre à une demande sans cesse renouvelée, toujours avec cette même philosophie écoresponsable. L’économie circulaire est vaste et les Mauriciens doivent pouvoir en bénéficier avec les meilleurs outils et dans les meilleures conditions. La compagnie NetLab est aujourd’hui positionnée dans le service, mais nous n’excluons pas à moyen terme de nous développer dans le « retail », le marketing ou le SaaS («Software as a service »).

Revenons à l’immobilier. Il y a quelques années il y a eu un débat comme quoi l’immobilier n’était pas un investissement productif pour le pays. D’ailleurs, l’ancien Premier ministre, sir Anerood Jugnauth, était d’accord à ce propos. Quel est votre avis ?
Les investissements RES/IRS captent 50 % du marché immobilier mauricien et Maurice possède le plus gros potentiel de développement foncier en Afrique. L’immobilier est certainement la plus grosse source d’investissements pour Maurice et est probablement un important pourvoyeur d’emplois. Il me semble que le gouvernement prévoit la création de milliers d’emplois dans la construction et le développement immobilier. Et il y a fort à parier que ces investisseurs auront un fort impact capitalistique sur le secteur manufacturier et celui des services. Alors certes l’investissement en lui-même n’est peut-être pas le plus productif, mais il faut en considérer tous les contours.
Pour ce qui est de molakaz.mu, nous concentrons les biens immobiliers en un seul et même endroit afin de permettre aux Mauriciens d’effectuer leurs transactions entre eux, sans frais complémentaires. Nous ne participons pas à la commercialisation de programmes neufs, et si tel devait être le cas dans le futur, alors nous adapterions notre modèle pour que les individuels soient toujours mis en avant.

De manière générale, Maurice peine à attirer des investissements étrangers. Où se situe réellement le problème selon vous ?
L’exode des investisseurs étrangers est indéniable. Ils se dirigent vers d’autres destinations, je suppose, par crainte de fluctuations non considérées. La guerre commerciale entre les États-Unis et la Chine, la volatilité des marchés financiers et l’appréciation des devises sont autant d’éléments qui sèment le doute. Au niveau national, l’activité touristique se dégrade, les indicateurs économiques ne sont pas au mieux et la dette publique est suivie de près. Les opérateurs financiers y sont forcément sensibles. Il faut ajouter la décision stratégique internationale des investisseurs de réduire leur facteur de risque dans les pays émergents et pré-émergents. Le désinvestissement n’est donc pas systématiquement le reflet de l’état des marchés financiers, il est peut-être aussi lié à une prise de profits au moment opportun.
La situation est selon moi loin d’être désespérée. En effet, l’achat de titres par les étrangers démontre leur confiance et ces titres sont certainement à leur cours le plus bas. Qui plus est, les poids lourds de l’économie mauricienne sont en bonne santé ; ils se restructurent, se diversifient et se renforcent pour accroitre leurs performances. L’un des rôles de ces compagnies doit être d’accompagner, d’une façon ou d’une autre, les investisseurs étrangers à se développer via des partenariats fructueux. En tant qu’investisseur, je suis moi-même très optimiste.

Pourquoi un ingénieur spécialisé dans l’intelligence artificielle est-il venu investir dans des sites Internet à Maurice ?
Je suis arrivé à Maurice en janvier 2015 sans idée préconçue. Je suis d’origine française mais Maurice est mon pays d’adoption. Je me comporte humblement et mets un point d’honneur à essayer de rendre aux Mauriciens tout ce qu’ils m’apportent. Je suis arrivé avec un bagage professionnel qui m’a permis d’envisager plusieurs possibilités. Différents éléments m’ont amené à me lancer sans hésitation dans ce projet.
Je connais le potentiel de l’Afrique pour y avoir évolué durant quelques années. J’ai notamment créé une Ong pour venir en aide aux enfants nécessiteux au Bénin et au Togo. Nous avons construit, rénové, informatisé plus de 30 écoles et hôpitaux. Cette expérience m’a indéniablement rapproché de ce continent, dont Maurice est une excellente porte d’entrée. Ensuite, Maurice, dont le lien avec la France reste étroit, est en passe d’atteindre une réelle maturité technologique. Les usages se généralisent et la demande est croissante. Initier la mise en place d’une économie circulaire me semblait être ce que je pouvais faire de plus salutaire pour mon pays d’adoption. Avoir fait des études d’ingénieur est une chose, les mettre à profit du plus grand nombre en est une autre. Ma tête et mon cœur sont indissociables.

Mais le pays reste en retard dans le domaine de l’intelligence artificielle…
L’IA se retrouve dans nos téléphones, nos laptops, nos téléviseurs, les objets connectés… elle est partout. Maurice, comme de très nombreux autres pays, n’a pas encore pris le virage de l’IA en tant qu’acteur mais est l’un des premiers pays africains en tant qu’utilisateur. Nous n’avons et n’aurons pas besoin d’intégrer l’IA dans nos modes de vie, cela se fera naturellement, parfois insidieusement. Il n’en reste pas moins que la principale problématique s’articule autour des ressources humaines. Les besoins en formation sont nombreux, les travailleurs qualifiés rares et les investissements spécifiques pour l’instant sporadiques. Apporter les qualifications requises à nos jeunes ne peut se faire qu’en incorporant des formations diplômantes au cœur des programmes actuels. Il est essentiel que Maurice ne dépende pas de ressources externes mais qu’elle développe ses propres richesses. Nous ne pouvons ni nous en dispenser ni en faire l’économie. Il en va du rayonnement du pays.

Quels sont les secteurs porteurs pour l’économie mauricienne ?
Je ne vous surprendrai pas en évoquant l’économie collaborative… Elle est source de progrès pour tous les pans de notre société. L’économie océanique, le développement du numérique, les énergies renouvelables et les sciences de la vie me semblent également être des secteurs très porteurs, sans oublier l’immobilier de bureau et la construction.

On parle aujourd’hui de plus en plus de développement durable. Les entreprises locales sont-elles sur la bonne voie dans ce domaine et le gouvernement joue-t-il pleinement son rôle, sachant que l’initiative Maurice Île Durable est du domaine du passé ?
Maurice est un état insulaire dont la survie dépend de notre constante attention. Nous devons tous nous sentir concernés par le changement climatique et le développement durable. Nous avons tous un rôle à jouer. Concernant les entreprises locales, certains projets sont matures et de nombreuses initiatives sont à saluer. La prise de conscience est globale, il nous faut agir au niveau local. Il est important de sensibiliser tous les acteurs dans les secteurs de l’éducation, de la recherche et de l’innovation. Il est tout aussi important de promouvoir les compagnies qui contribuent à améliorer notre qualité de vie. NetLab en fait partie et nous y mettons un point d’honneur.

Lorsque des hommes d’affaires étrangers ont un sens élevé de la notion de l’innovation et de la créativité, ils ne demandent pas ce que leur pays d’adoption peut leur apporter. Philippe Jaunet en fait partie. Cinq ans après son installation à Maurice, l’apport de l’informatique aidant, il est parvenu à se frayer une voie dans le secteur si compétitif qu’est celui de la vente et de l’achat de produits de seconde main. 

Quels facteurs ont pesé dans la balance pour que Maurice soit le choix de votre destination en tant qu’entrepreneur  et  ingénieur  de formation avec une spécialisation dans le domaine de l’intelligence artificielle ? 
Je suis arrivé à Maurice il y a plus de cinq ans, sans idée préconçue. Je n’ai donc pris en considération aucun facteur lié à une éventuelle implantation professionnelle. Mes préoccupations étaient davantage personnelles. Je suis d’origine française mais Maurice est vite devenu mon pays d’adoption. Je me comporte humblement et je mets un point d’honneur à essayer de rendre aux Mauriciens tout ce qu’ils m’apportent. 

Je suis arrivé avec un bagage professionnel qui m’a finalement permis d’envisager plusieurs possibilités. Tout d’abord, je connais le potentiel de l’Afrique pour y avoir évolué durant quelques années. J’ai notamment créé une ONG pour venir en aide aux enfants nécessiteux au Bénin et au Togo. Cet engagement a permis la construction, la rénovation et l’informatisation de plus de 30 écoles et hôpitaux.

Que vous a apporté spécifiquement cette expérience? 
Elle m’a indéniablement rapproché de ce continent dont Maurice est probablement la meilleure plate-forme Business. Ensuite, Maurice, dont le lien avec la France reste étroit, est en passe d’atteindre une réelle maturité technologique. Les usages associés à la technologie se généralisent. La demande est croissante. En tant qu’entrepreneur, initier la mise en place d’une économie circulaire me semblait être ce que je pouvais faire de plus salutaire pour mon pays d’adoption. Avoir fait des études d’ingénieur est une chose, les mettre au profit du plus grand nombre en est une autre.

Cinq ans après votre installation à Maurice, qu’est-ce qui vous a conforté dans l’idée que vous vous êtes fait préalablement de la destination? 
L’idée que je me faisais de Maurice lors de mon arrivée était plutôt celle d’une carte postale. En ce sens, j’ai été plus que conforté. En revanche, je ne venais pas pour me réaliser professionnellement. Par la suite, l’idée a fait son chemin. J’ai donc pris en considération certains facteurs évoqués un peu plus tôt dans la précédente question. Ainsi, il a fallu m’intéresser à la culture, aux modes de vie et de communication, à la diversité des communautés, aux codes business, aux réseaux mais également à la situation sociale, économique et politique du pays. 

L’introspection qui s’en est suivie m’a conduit à développer un projet destiné à améliorer la qualité de vie des Mauriciens tout en optimisant leur pouvoir d’achat. Qui plus est, un projet écoresponsable dont les rôles social et sociétal sont majeurs. Weshare.mu est né en septembre 2016 après une année d’études, de recherches et de développements. Sans réseau, sans notoriété, sans antériorité et sans appuis financiers externes, le chemin fut long et tortueux avant de pouvoir l’exprimer à ce sujet aujourd’hui.

Quelles idées avez-vous dû abandonner en cours de route pour faciliter votre adaptation à la situation spécifique de Maurice et les raisons qui expliquent cette posture ?
La situation spécifique de Maurice n’est contrariante que pour celui qui ne fait pas l’effort de s’intégrer. Certains aspects peuvent, certes, diverger du fonctionnement européen, mais c’est à moi de m’y conformer, et non le contraire. Je pourrais citer la ponctualité, dont la notion est ici très relative ; les applications, il y en a partout, pour tout, trop ; le turn-over des employés ; les «oui» de bienséance et le niveau de la formation, par exemple. 

Je crois que l’une des composantes d’un entrepreneur est la capacité d’adaptation. Pourquoi adopter cette posture ? Simplement parce que je m’y sens à l’aise. Chaque pays a ses règles. Je les respecte. Mais la situation la plus complexe à appréhender à Maurice est sans aucun doute celle des ressources humaines. Ce dossier serait trop long à évoquer maintenant mais il me semble être une priorité absolue.

Votre installation à Maurice a débouché sur la création de trois plates-formes, toutes associées aux ventes et aux achats. Parmi les produits qui entrent dans les perspectives des activités de ces plates-formes figurent les voitures et les biens immobiliers. Lequel de ces deux axes d’activités a enregistré l’évolution la plus marquante?
En effet, à la suite de la première expérience réussie de weshare.mu, nous avons pris la décision, mon associé Ludovic Balloux et moi-même, de développer nos verticales en segmentant notre offre. C’est à ce titre qu’a été créé Netlab, holding sous l’égide duquel les plates-formes weshare.mu, molakaz.mu et cardealerz.mu sont fédérées et mutualisées. 

Weshare.mu est aujourd’hui le leader incontesté des petites annonces à Maurice, avec cinq millions de pages vues mensuellement et plus de 800 000 visiteurs uniques en 2019. Un facteur qui en fait le premier support média de masse pour des utilisateurs en situation d’achat. Nous avons analysé et interprété nos données sur trois ans dans un premier temps, puis consulté nos utilisateurs dans un second. Plusieurs secteurs suscitent un intérêt majeur, l’immobilier et les véhicules en font partie.

Sur quoi ce constat a-t-il débouché? 
C’est la raison pour laquelle molakaz.mu et cardealerz.mu ont vu le jour. Les lancements de deux autres verticales sont planifiés dans le courant du premier semestre mais je ne peux vous en dire davantage dans l’immédiat, si ce n’est qu’elles seront conformes en tous points à nos valeurs et à notre vision. 

Pour ce qui est des chiffres de molakaz.mu, l’accueil a été remarquable. Nous avons lancé molakaz.mu le 16 décembre 2019. En un peu plus d’un mois, le site comptait plus de 50 000 visiteurs uniques, 120 000 sessions et un million de pages vues. L’engagement est très marqué puisque, à chaque session, le temps moyen est d’environ 10 minutes. L’état de l’offre ne répondait plus à la demande, molakaz.mu est ainsi devenu le leader des annonces immobilières entre particuliers en moins de deux mois. 

Cardealerz.mu a été lancée le 14 février, je n’ai donc que très peu de recul pour vous répondre objectivement sur les chiffres. Néanmoins, il est aujourd’hui avéré que cardealerz.mu est déjà numéro un en termes de nombre d’annonces de véhicules entre particuliers. Les chiffres s’annoncent encore plus spectaculaires que ceux de molakaz.mu. 

Netlab génèrera plus de 100 millions de pages vues en 2021.

Un de vos projets concerne la mise en place d’un écosystème circulaire. Quels sont les facteurs qui vous ont incité à prendre cette option en faveur d’un mode de développement qui respecte l’environnement?
Les facteurs sont multiples. En 2016, la naissance de weshare.mu répondait à une façon de vivre et de consommer en pleine mutation. Weshare.mu est aujourd’hui devenue un modèle populaire comme en témoignent nos 820 000 visiteurs uniques et notre place de 1er site le plus fréquenté à Maurice par des utilisateurs en situation d’achat. 

Avec molakaz.mu et cardealerz.mu, le succès de Netlab est l’incarnation d’une certaine philosophie de consommation, celle de la seconde vie des objets. À travers les échanges et les opportunités qu’il suscite au quotidien, Netlab joue un vrai rôle non seulement dans la transition environnementale et l’économie circulaire mais aussi dans l’amélioration du niveau de vie et du pouvoir d’achat des Mauriciens. Autant d’échanges et de rencontres qui font aussi de Netlab un facilitateur de lien social de proximité. 

Aujourd’hui, trois Mauriciens sur quatre utilisent nos plates-formes Netlab dans toutes les facettes de leur vie : logement, véhicule, déco, mode, multimédia… Netlab est donc le reflet du quotidien des Mauriciens, de leurs comportements, de leurs besoins. Elle endosse un véritable rôle de service public qui nous confère une responsabilité dont nous sommes pleinement conscients, celle d’être un acteur exemplaire dans notre activité et de promouvoir des échanges plus responsables, c’est-à-dire plus écologiques, plus transparents et plus respectueux des individus et de la société.

En tant qu’étranger qui a décidé d’intégrer le secteur économique du pays, que pensez-vous des efforts consentis jusqu’ici pour que le pays s’impose une approche susceptible d’atteindre un juste équilibre entre le développement et le respect que tout pays doit avoir à l’égard de l’environnement ?
C’est un véritable enjeu. Le gouvernement mauricien prêche en ce sens. Les sacs en plastique non biodégradables sont interdits. Des mesures sont prises pour réduire les gaz à effet de serre. Les déchets solides et dangereux subissent un traitement désormais spécifique. Il reste cependant beaucoup à faire. Une démarche proactive des entreprises associées à une réelle prise de conscience des consommateurs est indispensable à l’adhésion du plus grand nombre.

Que faut-il faire, à votre avis, pour obtenir une plus grande adhésion de la population aux efforts consentis jusqu’ici en vue d’une protection plus consciencieuse de l’environnement? 
Les campagnes de sensibilisation manquent cruellement à Maurice. Prenons l’exemple du commerce de biens de seconde main, que je connais bien. Ses bienfaits sont considérables. En offrant une seconde vie aux objets, Netlab contribue à favoriser une consommation responsable. Concrètement, grâce à cette démarche, Netlab prolonge également la durée de vie des objets tout en retardant leur statut de déchets, accentue la lutte contre l’obsolescence programmée. L’audience suscitée permet à Netlab de jouer un rôle majeur au niveau de l’économie circulaire de Maurice.

Quels sont vos arguments pour justifier votre engagement dans un secteur d’activités qui favorise l’utilisation des objets de seconde main? 
Plusieurs études sur l’impact environnemental du commerce d’occasion permettent de mesurer l’impact positif des activités telles que la nôtre sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Elles révèlent que les utilisateurs des sites d’objets de seconde main, à l’échelle mondiale, permettent d’économiser annuellement plus de 300 millions de tonnes de CO2 dans le monde et que plus de 900 millions de biens ont évité la poubelle en 2019. C’est ce qui me semble être le juste équilibre entre le développement et le respect de l’environnement, autrement nommé le développement durable. À la lumière de ce constat, notre rôle consiste indéniablement à apporter notre soutien aux initiatives de promotion de modes de consommation plus responsables et participer ainsi à la sensibilisation et à la prise de conscience mauricienne sur ces sujets. Notre réflexion pour mener à bien le développement de cette filière est quotidienne. 

Maurice est entré de plain-pied dans un système de consommation n’ayant, dans la plupart des cas, aucune option à l’usage unique de certains produits comme le plastique. Que faudra-t-il entreprendre pour renverser cette tendance avec pour objectif de favoriser l’entrée en scène d’un mode de développement et de consommation où la notion de développement durable est présente en tout ce qui est entrepris comme projet, que sa mise en route soit envisagée sur les court, moyen et long terme ? 
Le chantier est énorme, nous en sommes aux fondations. Comment concilier croissance rapide et éco responsabilité lorsque la priorité est financière ? Le pays est en construction, les champs de canne laissent la place aux malls, smart cities et autres résidences privées. Les projets relatifs à la promotion des énergies renouvelables se développent à un rythme aléatoire. Le parc automobile est erratique. La surconsommation guette. Elle est en totale opposition avec toute idée que l’on puisse se faire du développement durable. Le bilan carbone devient indécent et le gâchis terrifiant. 

Si nous agissons tous à notre niveau, tant personnel que professionnel, alors ce sera une première étape. Nous n’y sommes pas. Maurice est un État insulaire. Sa survie dépend de notre constante attention. Nous devons tous nous sentir concernés par le changement climatique et le développement durable. Nous avons tous un rôle à jouer. 

Concernant les entreprises locales, certains projets sont matures et de nombreuses initiatives sont à saluer. La prise de conscience est globale. Il nous faut agir au niveau local. Il est important de sensibiliser tous les acteurs dans les secteurs de l’éducation, de la recherche et de l’innovation. Il est tout aussi important de promouvoir les compagnies qui contribuent à améliorer notre qualité de vie. NetLab en fait partie. Nous y mettons un point d’honneur. Mais permettez-moi de finir par une question qu’il serait intéressant de développer: une marque peut-elle réellement avoir une conscience environnementale ?

Maurice vit constamment sous l’effet de la rupture technologique en raison des innovations occasionnées par des technologiques naissantes et il doit constamment s’adapter. La prochaine rupture, si elle n’est pas déjà sur place, est celle que va provoquer l’intelligence artificielle. Quelles répercussions l’introduction de l’intelligence artificielle,en tant que technologie innovante, risque-t-elle de provoquer dans le pays ?
Notre modèle doit constamment se développer concomitamment à l’essor de nouveaux usages. En effet, la rupture technologique telle qu’elle est communément définie concerne le produit. Elle mue désormais vers les usages. Mais qu’est-ce que l’intelligence artificielle? En 1956, Marvin Lee Minsky la définissait ainsi : «La construction de programmes informatiques qui s’adonnent à des tâches qui sont, pour l’instant, accomplies de façon plus satisfaisante par des êtres humains car elles demandent des processus mentaux de haut niveau tels que l’apprentissage perceptuel, l’organisation de la mémoire et le raisonnement critique». 

Cette intelligence artificielle, l’IA, nous ne la voyons pas. Nous la vivons au quotidien. Maurice, comme de très nombreux autres pays, n’a pas encore pris le virage de l’IA en tant qu’acteur. Il est l’un des premiers pays africains en tant qu’utilisateur. Nous n’avons et n’aurons pas besoin d’intégrer l’IA dans nos modes de vie. Cela se fera naturellement, parfois insidieusement. Maurice, du fait de son rapide rythme de développement, ne rencontre pas d’obstacles techniques à l’introduction de nouvelles technologies.

L’entrée en scène de toute forme de technologie innovante implique obligatoirement le recours à de nouveaux comportements. Qu’en est-il de l’intelligence artificielle?  
Il est important de mettre à nouveau l’accent sur les nouveaux comportements à adopter. Il est en effet confortable de faire ce que l’on sait faire, comme nous savons le faire. En outre, certains s’inquiètent des conséquences qu’aurait un manque de contrôle de l’IA. Nous avons tous entendu parler de cyberguerre, de robots militaires ou encore de l’explosion de la courbe du chômage. A contrario, il existe des perspectives d’évolution positive pour l’Homme et la planète, dans le domaine médical ou pour la prévention des catastrophes naturelles par exemple.